Paul & Mick Victor
2023-10-09 20:07:24 UTC
[I. comme Interprétation] :
Lorsque l’on joue un concerto, il est naturel d’opposer la lecture
orchestrale collective à la subjectivité du ou des artistes solistes.
Évidemment, certains éléments d’appréciation d’une interprétation sont
objectifs. Par exemple, le tempo. Mais que se cache-t-il derrière un
tempo lent ? Je pense par exemple à Alexandre Toradze dans le Concerto
no 2 de Prokofiev. Il y exprime une grande subjectivité, comme s’il
plaquait un scénario sur les notes, une histoire fantastique, connue de
lui seul, et rendant son interprétation passionnante pour le public. Je
suis réservé envers les artistes trop “objectifs”. J’ai entendu dans ma
vie de nombreuses interprétations parfaites mais vides ; j’ai vu des
techniciens extraordinaires, sans aucune profondeur. C’est le drame de
notre temps. Pour les solistes et aussi pour la musique orchestrale.
Aujourd’hui, les grandes phalanges sont capables de tout jouer après
quelques heures de répétitions. Même les œuvres jugées les plus
difficiles dans le passé, comme Le Sacre du printemps, sont exécutées
sans problème. Dans ce sens il y a un progrès. Mais quid de
l’interprétation ? Comment rendre éloquentes ces milliers de notes de
la partition du Sacre ? Il est facile de rester à la surface. Entrer
dans une partition, tenter d’en percer les mystères, c’est autre chose.
Le Sacre du printemps n’est pas seulement une œuvre spectaculaire.
Il est fondamental de chercher la vérité de la partition. Une vérité
qui n’est pas extérieure au texte, mais qui se trouve dans les notes.
Si Toradze ou Trifonov interprètent une musique avec originalité, avec
subjectivité, ils établissent toujours un dialogue fructueux avec le
compositeur. C’est pourquoi j’ai aimé et soutenu Lucas Debargue pendant
le Concours Tchaïkovski 2015. Son Gaspard de la nuit était très
“artiste”. Cela changeait des performances uniquement sportives que
l’on peut souvent entendre dans ce genre de compétition.
Valery Gergiev : Rencontre. Entretiens avec Bertrand Dermoncourt. Actes
Sud, 2018.
--
Paul & Mick Victor
Ohé ! Y'a quelqu'un ?
Lorsque l’on joue un concerto, il est naturel d’opposer la lecture
orchestrale collective à la subjectivité du ou des artistes solistes.
Évidemment, certains éléments d’appréciation d’une interprétation sont
objectifs. Par exemple, le tempo. Mais que se cache-t-il derrière un
tempo lent ? Je pense par exemple à Alexandre Toradze dans le Concerto
no 2 de Prokofiev. Il y exprime une grande subjectivité, comme s’il
plaquait un scénario sur les notes, une histoire fantastique, connue de
lui seul, et rendant son interprétation passionnante pour le public. Je
suis réservé envers les artistes trop “objectifs”. J’ai entendu dans ma
vie de nombreuses interprétations parfaites mais vides ; j’ai vu des
techniciens extraordinaires, sans aucune profondeur. C’est le drame de
notre temps. Pour les solistes et aussi pour la musique orchestrale.
Aujourd’hui, les grandes phalanges sont capables de tout jouer après
quelques heures de répétitions. Même les œuvres jugées les plus
difficiles dans le passé, comme Le Sacre du printemps, sont exécutées
sans problème. Dans ce sens il y a un progrès. Mais quid de
l’interprétation ? Comment rendre éloquentes ces milliers de notes de
la partition du Sacre ? Il est facile de rester à la surface. Entrer
dans une partition, tenter d’en percer les mystères, c’est autre chose.
Le Sacre du printemps n’est pas seulement une œuvre spectaculaire.
Il est fondamental de chercher la vérité de la partition. Une vérité
qui n’est pas extérieure au texte, mais qui se trouve dans les notes.
Si Toradze ou Trifonov interprètent une musique avec originalité, avec
subjectivité, ils établissent toujours un dialogue fructueux avec le
compositeur. C’est pourquoi j’ai aimé et soutenu Lucas Debargue pendant
le Concours Tchaïkovski 2015. Son Gaspard de la nuit était très
“artiste”. Cela changeait des performances uniquement sportives que
l’on peut souvent entendre dans ce genre de compétition.
Valery Gergiev : Rencontre. Entretiens avec Bertrand Dermoncourt. Actes
Sud, 2018.
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Paul & Mick Victor
Ohé ! Y'a quelqu'un ?