Discussion:
Métronome
(trop ancien pour répondre)
Paul & Mick Victor
2023-10-02 00:52:03 UTC
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À propos du métronome, j'ai retrouvé une contribution que j'avais
postée sur ce forum en 2002, et que je redonne ici, parce qu'elle était
admirable. T'imagines ? plus de 20 ans ! C'est une tranche de vie !
C'est qu'il s'en passe des choses, en 20 ans ! Tu te souviens ? 2002,
l'arrivée de l'euro, Le Pen au second tour des élections… C'est déjà de
l'Histoire. Au printemps, j'avais trois amis, chantait Marie-Noël, la
bonne dame d'Auxerre. Le premier est fol devenu, le deuxième est mort
devenu, le troisième est vieux devenu, à quoi répondait en écho le
pauvre Rutebeuf, ce sont amis que vent emporte… À cette époque, il
n'était pas rare qu'un fil de framc comporte une centaine de
commentaires. Et attention ! il y avait du contenu, des idées ! des
contradictions ! des arguments ! On ne se contentait pas de balancer un
lien Youtube ! On retrouvera tout au long de cette interminable
contribution quelques allusions à Melmoth, Toulet, Gero, le psychiatre
(†), Tournier (†), Yves C., Nutella (c'était David le Marrec, ainsi
surnommé parce qu'il tartinait encore plus que moi), Redis-le-Moelleux,
(c'était Patachon, également dit la Patache mortelle, avec qui j'avais
eu quelques sanglantes engueulades), Papidécati, (c'était G. Préyale),
Sergent, Trop Polloli pour être au Net, mon collègue et néanmoins ami,
et les filles, La Fred, Papagena. Ceux qui sont fous devenus, ceux qui
sont morts devenus, ceux qui sont vieux devenus, ceux que le vent a
emporté. Ça s'appelait "Les invraisemblables aventures de Maelzel", et,
en relisant, c'était, après tout pas mal troussé.

"La neige colle aux carreaux, les bûches crépitent dans l'âtre,
réjouissez-vous, gens du forum. Paul & Mick Victor va vous narrer les
invraisemblables aventures de Maelzel. Approchez, mes enfants, faites
cercle, allez chercher les absents, installez vous bien à l'aise, les
plus petits devant, s'il te plaît Melmoth, cesse de te gratter les
khouilles, mon garçon, et laisse la place à papidécati, mais oui, il
est plus petit que toi, et il n'entend pas très bien, le pauvre. Tout
le monde est installé, ça y est ? La Fred et Papagena, soyez sympa, les
filles, vous aurez tout le temps après pour raconter vos histoires,
hein…

Adoncques, sur le tableau de bord de notre machine à remonter le temps,
réglons le transfusateur inductif à bobines tri-magnétiques sur la date
du 15 août 1772. Fermons les yeux un moment, ça secoue un peu, n'aie
pas peur, Nutella, ça ne sera pas long, d'ailleurs nous y voilà,
Ratisbonne, tout le monde descend ! Ratisbonne, vous ne connaissez
peut-être pas, c'est une charmante petite localité de Bavière, sur le
Danube, localité que les Allemands, ces khons, n'appellent pas
Ratisbonne, mais Regensburg, pour d'obscures raisons teutonnes sur
lesquelles il serait inutile de s'étendre. En ce 15 août 1772, le
soleil rayonne, il fait très chaud et toutes les fenêtres sont
ouvertes. Braquons notre objectif indiscret vers les fenêtres du 19
Müllerstrasse. Quelle curieuse agitation aujourd'hui chez les Maelzel !
On fait bouillir de l'eau, le vieux Tobias Nussbaumer, le médecin,
entre précipitamment dans l'immeuble, enfin des cris de nourrisson
viennent secouer la torpeur de ce début d'après-midi estival. Madame
Maelzel vient de mettre au monde un adorable bambin de 3,6 kilos.
Comment c'est-y qu'on va l'appeler, ce p'tiot ? demande l'heureuse
maman à son bonhomme de mari. T'as pô une idée, toi ? Monsieur Maelzel
père se gratte la tête, ben non, j'en ai pô… — J'en ai pô, j'en ai pô,
répète le vieux Tobias Nussbaumer, hilare, Jean-Népo… mucène !! Adjugé
vendu, il s'appellera Jean-Népomucène, ce qui avouez-le, est un nom
rigolo, mais bien difficile à porter.

Le petit Jean-Népomucène, qu'on appelle toujours par facétie Jean-Népo,
grandit donc, jours heureux de l'enfance, entre une mère aimante dont
le cœur est un réservoir infini de tendresse, et un papa qui cache sous
une apparente sévérité des trésors d'indulgence. Il est facteur, le
papa de Jean-Népo, non pas le facteur que vous connaissez, celui qui
vaillamment, chaque jour, au mépris de la pluie et du vent, affronte la
boue du chemin ou le soleil de plomb de nos étés qui ne sont plus ce
qu'ils étaient, pour vous apporter le catalogue de la Redoute (qui
c'est qu'a dit des 3 Suisses ?) ou la feuille d'impôt tant espérée,
non, il est facteur d'orgue. Qu'est-ce ça veut dire ? Ca veut dire,
Toulet, qu'il fabrique des orgues. C'est un bricoleur, le papa Maelzel,
et un bricoleur de génie. Rouages, ressorts, cames, leviers, pistons,
bielles, poulies, il est aussi à l'aise devant un engrenage compliqué
qu'un gynécologue devant un chancre mou, je t'expliquerai, Papagena.
Lorsqu'une machine tombe en rideau dans Ratisbonne, qui c'est qu'on va
chercher ? Le père Maelzel ! Quand l'horloge municipale dékhonne et
sonne midi à 14 heures, qui c'est qu'on va chercher ? Le père Maelzel !
Quand la batteuse-lieuse du vieil Hermann ne bat plus rien que la
breloque, qui c'est qu'on va chercher ? Le père Maelzel ! (qui est
d'ailleurs très prudent avec ces engins, vu qu'il s'est déjà fait
happer le bras par une batteuse-lieuse en 1762, et qu'on l'a surnommé
depuis par dérision, les gens sont méchants, l'happé de Ratisbonne…)

Musique et mécanique, tel est donc le credo du père Maelzel, qui offre
à son fils, outre des leçons de piano, un beau meccano, un vrai, avec
des pièces en métal bleues et jaunes bien rangées dans leur boîte, la
petite clé pour serrer les écrous, vous ne connaissez pas, les jeunes,
c'était autre chose que les Playmobil ou les Lego en plastoc qu'on fait
maintenant. Qu'est-ce que tu veux faire, plus tard ? qu'elle demande,
la maîtresse au petit Jean-Népo, qui répond invariablement : je serai
musimécanicien… Ca 'xiste pas, s'esclaffent ses petits khamarades. Et
ben, je serai le premier, dit l'entêté gamin en serrant ses petits
poings, et celui qu'est pas d'accord, jui pète la gueule à la récré…
Alors il récolte une punition, et il se trompe, l'innocent bambin.
C'est qu'il ne peut pas savoir que bien des années avant lui, le père
Athanase Kircher, jésuite génial et baroque, méritait déjà ce titre
merveilleux de musimécanicien. Mais ceci est une autre histoire que je
vous conterai un jour, si vous êtes sages…

Adoncques, le jeune Jean-Népo fait des progrès rapides, ben tiens,
quand on travaille sérieusement ses gammes et ses arpèges, hein, Yvecé
? Si bien qu'à 14 ans, il est considéré comme l'un des meilleurs
pianistes de Ratisbonne, et qu'il commence à donner des leçons, dont il
rapporte ponctuellement tout l'argent à sa maman, ne distrayant que
quelques piécettes pour s'acheter Système D, le Haut-Parleur, ou plus
rarement les Folies de Paris-Hollywood, ben quoi, t'as jamais été
travaillé par la puberté, toi ? Y'a pas que la partie mécanique, dans
la vie, y'a aussi la partie mec à nique, hein… Elle est excellente.
Mais l'appel des rouages est le plus fort. Il en rêve la nuit, quand
les engrenages dansent leur samba effrenée autour de son lit, il en
rêve le jour, et dans sa tête pistons et bielles pratiquent d'obscènes
copulations sous l'œil lubrique des ressorts à boudin et des écrous.
C'en est trop… En 1802, le 16 septembre, je m'en souviens comme si
c'était hier, il venait d'avoir 30 ans, comprenant que Ratisbonne,
c'était bien gentil, mais que pour un fondu de la mécanique, ça
manquait un peu d'avenir, il fait son baluchon, embrasse sa vieille
maman, son papa qui est en train de rafistoler un coucou de la Forêt
Noire, et il s'écrie : À nous deux, Paris !

Car avant d'aller se perfectionner dans son art à Londres, puis à
Vienne, c'est à Paris d'abord que Jean-Népo va chercher la gloire. On
ne voit que lui au rayon bricolage du BHV. Chez Castorama, on l'appelle
Monsieur Maelzel gros comme le bras, vu le pognon qu'il y laisse, ils
peuvent bien, hein, et les jours de Salon du Bricolage ou de Concours
Lépine, il est le premier à franchir le seuil et le dernier à quitter
les lieux. C'est à cette période qu'il s'attelle à la fabrication du
Panharmonikon, dont trop Polloli pour être honnête a rappelé que ça
n'avait pas de rapport avec les points Mekilékon. J'ai déjà parlé
longuement de ce mystérieux instrument, mais comme personne n'écoute,
hein ! C'est malheureux, mais on ne sait pas exactement à quoi
ressemblait ce bouzin. D'après les descriptions de l'époque, il
s'agissait d'une machine imposante composée de flûtes automatiques, de
clarinettes, de trompettes, de violons, violoncelles, tambours,
cymbales et triangle. Il pouvait également tirer des coups de
mousquets, pistolets, et canon. Il était paraît-il très puissant, mais
capable d'exécuter les nuances forte et piano avec une grande
précision. On peut penser que le Panharmonikon ressemblait à un
Limonaire. Il en existait un exemplaire au Landesgewerbemuseum (à tes
souhaits !) de Stuttgart jusqu'en 1942, date à laquelle ce musée fut
entièrement détruit lors d'un raid de l'Uhessairforce. C'est pour le
Panharmonikon, à la demande de Maelzel, que Beethoven entreprend de
composer la "Bataille de Vittoria" mais les deux hommes se fâchent et
le Grand Sourd, qui a de la suite dans les idées et de la rancune,
continue son œuvre, mais pour un orchestre symphonique cette fois…

Le Panharmonikon est présenté d'abord à Vienne, puis à Paris. Outre
Beethoven, Cherubini compose pour lui une pièce intitulée "Écho", mais
bon, Maelzel a besoin de pognon, il projette la construction d'un
nouveau modèle plus perfectionné, et vers la fin de 1807, il vend la
première version de son instrument pour la somme colossale à l'époque
de 60.000 francs. Il construit une deuxième prototype, qu'il emportera
bien plus tard aux États-Unis, et vendra à un riche américain pour
400.000 dollars. Mais revenons en cette fin d'année 1807. Après avoir
vendu son bouzin, Maelzel s'attache à la construction d'une nouvelle
machine, considérée comme son chef-d'oeuvre : le trompette automate. De
quoi s'agit-il ? demande Nutella dont les yeux brillent ! Et bien, père
la tartine, il s'agit ni plus ni moins que d'un joueur de trompette
mécanique, grand comme ça, avec soufflerie, percolateur coaxial et
réservoir à hélium concentré sous-jacent, taquet de dévérouillage
hélicoïdal, et tout et tout… Tu tournes la petite clé, tu mets les
piles, tu remplis de pétrole, t'allumes la mêche, et ça joue de la
trompette, avec une sonorité fabuleuse, et une virtuosité que même
Georges Jouvin avec sa trompette d'or, il pourrait pas faire mieux. La
vie d'un inventeur, parfois, c'est comme un conte de fée, on a bien
raison de le dire. La renommée de Jean Népo parvient vite aux oreilles
de l'empereur d'Autriche, rien que ça, qui le convoque dans son palais,
lui pince l'oreille, il a vu faire ça en France, et c'est ainsi que
l'enfant de Ratisbonne est élevé en 1808 au poste prestigieux de
Mécanicien en chef de la Cour, 1er échelon, avec clé à molette de
fonction, et décoré séance tenante de l'emblème de sa nouvelle dignité,
la pince-crocodile de vermeil sur fond de cambouis. Une nouvelle vie
commence.

Qu'est-ce qu'il y a, Redis-le-Moelleux ? tu ne comprends pas tout très
bien ? T'as envie d'aller faire pipi ? Bon, on va faire une petite
pause les enfants, le temps que j'ouvre une bière…

Ah, ça va mieux. Allez, on reprend. Installez-vous… Ben Gero, c'est à
cette heure-ci que tu arrives ? Tu faisais la sieste ? C'est dommage,
t'as raté le début. Tournier et Sergent, poussez un peu, dans le fond,
faites une tite place pour Gero. Allez Redis-le-Moelleux, dépêche-toi,
mon grand. Qu'est-ce qu'il y a ? T'arrives pas à te reboutonner ? Il me
tue, ce garçon !

Bon, où en étais-je ? Ah oui. Adoncques, Maezel est à la cour de
l'empereur d'Autriche, et c'est à cette époque, nous sommes en 1808,
qu'il commence à travailler sur le métronome. Alors là, je dis :
attention ! Pour bien des gens, le métronome c'est Maelzel, sans
réfléchir davantage, comme le cachou c'est Lajaunie, le camping c'est
Trigano ou les capotes anglaises, c'est Durex. Là, je répète :
attention, et je m'insurge. Prenez en main votre métronome, le vieux
j'entends, pas de ces machins électriques qu'on fait maintenant, la
belle pyramide en bois ciré avec la petite clé qui dépasse sur le côté.
Regardez-le bien ! Il a inventé quoi, Maelzel, là-dedans ? Il a inventé
la réglette graduée ousqu'il y a les chiffres et les indications de
tempo. Et c'est tout ! Tout le reste, c'est pas de lui. Et pourtant,
lorsqu'on dit "métronome", y'a toujours l'érudit de service pour citer
Maelzel, et la huitième symphonie du Grand Sourd, hommage au tic-tac de
la musicale mécanique. À ce propos, je ne suis pas toujours d'accord
avec trop Polloli pour être honnête sur les indications métronomiques
chez Beethoven, mais j'écris en ce moment un mémoire de 756 pages qui
sera publié en temps utile et apportera des révélations fracassantes
sur ce sujet…

L'idée d'un petit instrument qui servirait à battre la mesure et à
mesurer les temps n'est pas nouvelle à cette époque. Bien des années
auparavant, le grand Sauveur avait décrit dans les "Principes
d'acoustique" un tel appareil, conçu sur le modèle du pendule, et qu'il
avait appelé naïvement le Chronomètre. Ah, Sauveur ! Avec le père
Mersenne, avec Loulié, que ne lui doit-on pas ? Je vous parlerai un
jour de ses travaux sur les sons harmoniques, je vous raconterai
l'histoire de l'échomètre, que voilà un grand esprit, Sauveur ! Mais
revenons à nos moutons. Donc l'idée est dans l'air. Du chronomètre au
métromètre, les têtes pensantes se penchent sur le problème. En
Allemagne, un musicien du nom de Stoeckel a imaginé un appareil de ce
type, jamais réalisé parce que de dimensions colossales, mais dont il a
donné une description détaillée dans la Gazette Musicale de Leipzig,
pour ceux qui ont encore les vieux numéros, c'est à la page 673. On ne
sait pas grand chose de ce Stoeckel, sinon qu'il était cantor à Burg,
près de Magdebourg, et qu'il aimait par-dessus tout la crème caramel,
surtout quand elle était un peu brûlée. Toujours est-il que la Gazette
Musicale de Leipzig tombe un jour entre les mains de Jean-Népo, qui lit
l'article de Stoeckel avec une attention fiévreuse, et entreprend de
réaliser le bouzin décrit à la page 673.

Le problème du métromachin de Stoeckel, c'est qu'il est très gros, trop
gros, tu peux pas l'emporter avec toi en répète, il faut louer une
camionette… Et pourquoi qu'il est si gros, le bidule ? Simplement parce
que Stoeckel n'a pas su résoudre ce problème qui nous paraît
aujourd'hui si élémentairement enfantin : comment faire varier la
vitesse de battement sur une même mécanique ? Le métromachin battait
bien des vitesses différentes, mais pour chacune de ces vitesses, il
fallait une mécanique distincte, une pour lento, une pour adagio, une
pour andante, et t'essaieras, et t'essaieras… Tu vois d'ici l'engin. Et
Maelzel, pas plus que Stoeckel, ne trouve la soluce au problème. Il a
beau se creuser les méninges, rien, il est sec, Jean-Népo. Là, il est
tombé sur un os. Il y pense encore en 1812, lorsqu'il se rend en
Hollande pour faire un peu de lèche-vitrine. C'est là qu'il a l'idée
d'aller consulter son confrère en mécanique, le grand Winkel. Un petit
mot sur Winkel, mais rapide, pour ne pas lasser l'auditoire. Il se
prénommait Diedrich, ou Thierry-Nicolas, on n'est pas très fixé, et
avait commencé sa carrière en construisant des métiers à tisser, avant
de se lancer dans la facture d'orgues mécaniques, domaine dans lequel
il se fit vite remarquer pour la perfection de ses instruments. Winkel
reçoit fort poliment son concurrent, mais néanmoins ami, écoute
attentivement les données du problème, examine les plans et les
feuilles de calcul, et dit que bon, il va y réfléchir, et les deux
compères finissent la soirée en torchant une bouteille (certains disent
deux, d'autres trois) de genièvre dans un bar louche de Kalverstraate.

Maelzel rentre en Autriche avec une bonne gueule de bois, et oublie le
métromachin. Quelques années plus tard, nous sommes en 1815, il
retourne à Amsterdam pour présenter son Panharmonikon, rappelez-vous,
le nouveau modèle, et voilatipa que quelqu'un lui tape sur l'épaule,
c'était, vous l'avez deviné, Thierry-Nicolas Winkel. Salut, ça va, et
la petite famille, et tout ça, et tu te rappelles le problème que tu
m'avais soumis il y a trois ans, et ben ça y est, je crois que j'ai
trouvé ! Non ? Pas possible ? demande Jean-Népo, qui l'a complètement
oublié, et qui ne garde de son séjour dans la capitale batave que le
souvenir d'une cuite monumentale et d'une chaude-lance qui lui avait
fait pisser des lames de rasoir pendant trois mois au moins. Mais si,
qu'il insiste, Winkel, viens à la maison, je te montrerai. Assieds-toi,
prends un verre, un petit genièvre, ça nous rappellera le bon temps,
regarde, c'est enfantin, comme le dira dans quelques siècles P&MV : il
suffit d'une seule mécanique, avec un balancier, un seul, sur lequel on
ferait glisser un poids, de façon à déplacer le centre de gravité et à
imprimer des vitesses différentes au bidule. Ébloui par tant de géniale
simplicité, Maelzel se frappe le crâne violemment, mais bordel de
merde, mais oui, c'est bien sûr, quel khon, mais quel khon, mais que je
suis khon, c'est rien de le dire… Et Winkel de le consoler, mais non,
mais non, ça arrive à tout le monde, tiens, reprend un verre, mon gars,
et on ira voir les filles…

Maelzel revient à nouveau en Autriche, avec une gueule de bois qui vaut
largement la précédente, et là, soyons honnêtes, il se comporte comme
un salaud. Je n'aime pas dire du mal des gens, mais là, vraiment, comme
un salaud ! Ce pourri s'approprie la découverte de Winkel, remplace le
balancier par une réglette graduée, la seule partie du métronome qui
soit vraiment de lui, et présente l'objet fini à l'Institut de France,
qui donne son approbation dans la "Notice sur le métronome de Maelzel"
(Paris - 1816 - in-8 de 24 pages). Pire encore, poussé par l'appât du
gain, il crée à Paris une société commerciale pour fabriquer et
diffuser la géniale mécanique qui lui doit si peu. Il n'est pas exagéré
de dire qu'il se fait des khouilles en or. Winkel en est très attristé,
et quelque peu irrité, faut se mettre à sa place. Il fait paraître un
article cinglant dans la Revue Musicale de Leipzig, décidément la seule
revue qu'on semble lire à l'époque, (c'est dans le N° 25 pour ceux qui
ont gardé les archives) article où il explique que le monde est
méchant, et qu'il n'y a qu'un inventeur du métronome, et que c'est lui.
A l'occasion d'un déplacement de Maelzel en Hollande, Winkel demande
même à corzéacris l'arbitrage de l'Institut des Pays-Bas, qui examine
longuement le dossier, et convoque les deux compères. La vérité oblige
à dire que devant la commission, sommé de s'expliquer, Maelzel baisse
lamentablement son froc, reconnaît piteusement qu'il s'est comporté
comme un pignouf et un dégueulasse, mais que, hein, après tout, la
petite réglette graduée, c'est quand même bien de lui. L'affaire est
close.

L'affaire est close, mais la fortune souriant décidément aux salaud,
Maelzel continue d'empocher les bénéfices dégagés par la vente de son
métronome, dont il inonde l'Europe, et sans reverser un pélot à Winkel,
pas khon, Jean-Népo. Nous sommes à présent, petits amis, en 1817, et
Maelzel demeure à Vienne. C'est là qu'une nouvelle imposture va le
désigner à l'opinion publique : il s'agit du célèbre joueur d'échecs.

On a tout dit de ce joueur d'échec. Le grand Edgar Allan Poe lui-même
lui a consacré une nouvelle, dont vous lirez la traduction admirable de
Baudelaire. De quoi s'agissait-il ? D'une machine, d'un automate
capable de jouer aux échecs, et de gagner. À l'heure où Vladimir
Kramnik vient d'arracher le nul contre Deep Frizt et d'empocher 700.000
dollars, le sujet est d'actualité. Maurice Beaucaire, le sympathique
président de l'Union Échiquéenne de France, nous a donné une
description de cette étonnante mécanique : "L'automate était assis en
face d'un échiquier garni de toutes ses pièces. Il pouvait lever le
bras, saisir une pièce, et la plaçait sur la case où elle devait être
placée". Là encore, c'est bien à tort que le Joueur d'échecs est
attribué à Maelzel, qui s'est contenté de le racheter aux héritiers de
son véritable inventeur après le décès de celui-ci, j'ai nommé le baron
Wolfgang von Kempelen. Un mot sur ce baron, vous insistez vraiment ?
Souate ! Il était né à Presbourg en 1720, et accumulait les charges et
les titres prestigieux, puisqu'il était, entre autres, Conseiller de la
cour royale et impériale, Référendaire à la chancellerie de la cour
royale de Hongrie et Président de l'amicale bouliste des joyeux
cochonnets de la Haute-Vienne… C'était également un bidouilleur de
génie, à qui l'on doit la conception d'une machine parlante très
ingénieuse, décrite dans "Mechanismus der menschlichen Sprache, nabst
der Beschreibung einer sprechenden Maschine", publiée à Vienne en 1701,
avec 27 planches.

Le Joueur d'échecs avait été inventé dès 1770, mais c'est seulement au
début du XIXe siècle que Maelzel, le nouveau propriétaire, avec le sens
pratique et commercial que nous lui connaissons, lui apporte la
consécration. Allons, je peux bien vous le dire maintenant, c'est comme
au music-hall, dans le numéro du magicien, quand on met la bonne femme
dans la boîte et qu'on scie le cercueil, y'a un truc, une astuce à la
Robert Houdin. En fait, un vrai joueur d'échecs est caché dans le
coffrage de la machine, sous la table qui supporte l'échiquier, et
lorsqu'on ouvre ce coffrage pour montrer que non, y'a rien, un
astucieux système de miroirs dissimule le bonhomme. Ce joueur d'échecs
en chair et en os s'appelle M. Boncourt. Il a une qualité, il joue très
bien aux échecs, il a un défaut, il est très grand, il est trop grand,
si bien qu'il est obligé de se plier en quatre pour rentrer dans la
machine, et qu'il lui faut une bonne heure après la représentation pour
se déplier et retrouver l'aisance de ses mouvements, sans compter le
mal de dos.

Comme pour le métronome, Maelzel s'approprie sans vergogne la paternité
du Joueur d'échecs, ben dame, quand on a posé un pied sur la pente ô
combien savonneuse du crime, hein… Pire encore, il fauche une autre
invention de Kempelen, la machine parlante dont je vous ai déjà parlé,
et l'adapte dans le joueur d'échecs pour lui faire dire d'une petite
voix khonne : "Échec et mat"… Et dans la foulée, il dépose un brevet
pour une poupée parlante fonctionnant sur le même système de Kempelen
et qui dit : bonjour papa, bonsoir maman, la poupée, pas Kempelen. Faut
le faire, hein !

On pourrait écrire un livre sur les périgrinations du Joueur d'échecs.
Je ne manquerai pas de le faire dès que je serai à la retraite. Il est
présenté dans l'Europe entière, et rapporte des fortune à Jean-Népo
(fortunes qu'il gaspille d'ailleurs dans les bouges mal famés,
l'alcool, le strupre et la fornication, car il est aussi débauché que
malhonnête). L'automate dispute même une partie contre l'empereur
Frédéric à la cour de Berlin, partie que ledit Frédéric perd
d'ailleurs, ce qui incite le monarque à acquérir la machine. Elle reste
quelques années dans un placard, à prendre la poussière, jusqu'au jour
où Napoléon passant par là, ouvre le placard, récupère l'objet, lui
fait donner un petit coup de peinture et le ressuscite pour quelque
temps. Le prince Eugène, un grand gamin, ne résiste pas. Dès qu'il voit
le bidule, il tape du pied, trépigne, j'le veux, qu'il gueule, j'le
veux ! et il l'achete séance tenante 30.000 francs à Napoléon, qui
s'est bien gardé de lui expliquer qu'il y avait un truc et qui se marre
comme une baleine, quel khon, ce prince Eugène, qu'il dit à Joséphine,
le soir dans la couche impériale.

Le fait est que le prince Eugène s'est fait rouler, et dès qu'il s'en
aperçoit, il cherche à se débarrasser de la machine. Comme par hasard
Maelzel passe par là, mais hein, c'est de bonne guerre, c'est plus le
même tarif, et il récupère sa mécanique pour une bouchée de pain,
heureux de n'avoir pas réalisé une trop mauvais opération financière.
Comme M. Boncourt ne veut plus rentrer dans la boîte, faut se mettre à
sa place, à cet homme, il est remplacé par M. Alexandre, puis par M.
Mouret, et Maelzel reprend ses tournées en Europe, gagnant du pognon à
ne savoir qu'en faire, et le dépensant tout aussi vite avec des femmes
de mauvaise vie, des créatures qu'à côté desquelles les filles qui
fréquentent ce forum, malgré toutes leurs turpitudes, seraient
considérées comme des oies blanches. Pire encore, il paye ses joueurs
d'échecs au lance-pierre, le Jean-Népo, si bien que les malheureux,
déjà que passer des heures dans une boîte, c'est pas drôle, touchent
pour ça des clopinettes et se vengent bassement du patron en dévoilant
le truc à qui veut l'entendre. Très vite, ce mauvais procédé porte ses
fruits, et Maelzel est grillé. Le joueur d'échecs ? Y'a un truc, hé
patate ! Sans compter que ce panier percé accumule les dettes, et se
voit quotidiennement harcelé par une bande de créanciers féroces. Comme
bien d'autres, il se résout donc à l'exil, et, remplissant ses malles
d'automates, de son Panharmonikon, de son métronome, de son joueur
d'échecs, de son danseur de corde, et de bien d'autres trucs encore, il
passe en Amérique. Les douanes et les contrôles de police devaient être
moins sévères à l'époque. Aujourd'hui, avec un bric-à-brac pareil, il
ne pourrait jamais monter dans un avion, Jean-Népo. Je te dis pas le
portique de sécurité, comment qu'il se mettrait à couiner, hein…

Nous sommes à présent en 1827, le Grand Sourd s'éteint, et Maelzel
conquiert l'Amérique avec ses inventions. De New York à Philadelphie,
puis de Philadelphie à Boston où il s'installe, son succès est
considérable, ces yankees sont de grands enfants, ils se pressent pour
voir le Joueur d'échecs, le Panharmonikon, le danseur de corde, le
tompette automate. Il gagne des millions de dollar, Jean-Népo, et il
continue à produire des trucs pas possibles, tel cet automate à larynx
mécanique capable de monter et de descendre des gammes diatoniques et
chromatiques. Il perfectionne même le métronome, encore une fois à
partir de l'idée d'un autre. C'est en effet à Amiens que l'horloger
Bienaimé-Fournier a eu l'idée de fabriquer un métronome qui accentuait
certains battements, tous les deux, trois, ou quatre coups, de façon à
indiquer également les mesures. Maelzel adapte cette trouvaille,
intégre une petite sonnette qui marque ces coups accentués, et vend le
brevet à M. Wagner, horloger à Paris. C'est ce M. Wagner qui
construira, pendant des décennies, ces beaux métronomes qui sentaient
bon la cire et qui surmontaient si joliment les pianos des salons de
nos grands-mères.

Tout à une fin, petits amis. Un jour qu'il faisait un voyage vers
Philadelphie, Maelzel mourut, qui l'eût cru, pleurez mes yeux, c'était
au mois d'août 1838, il avait tout juste 66 ans. Le médecin appelé
essaya vainement de tourner la clé, de remonter le ressort, rien n'y
fit. La mécanique était cassée à jamais.

Et voilà qu'il est temps de nous séparer, petits amis. J'espère que mon
histoire vous a plu, et je vous souhaite une bonne nuit. Vous remettrez
les chaises en place en sortant, tiens, Redis-le-Moelleux s'est
endormi, c'est toujours comme ça quand il ne comprend pas très bien,
Melmoth, cesse de te gratter les khouilles, c'est agaçant à la fin, mon
garçon…"
Marcel grouillard
2023-10-02 05:31:44 UTC
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À propos du métronome, j'ai retrouvé une contribution que j'avais postée sur
ce forum en 2002, et que je redonne ici, parce qu'elle était admirable.
T'imagines ? plus de 20 ans ! C'est une tranche de vie ! C'est qu'il s'en
passe des choses, en 20 ans ! Tu te souviens ? 2002, l'arrivée de l'euro, Le
Pen au second tour des élections… C'est déjà de l'Histoire. Au printemps,
j'avais trois amis, chantait Marie-Noël, la bonne dame d'Auxerre. Le premier
est fol devenu, le deuxième est mort devenu, le troisième est vieux devenu, à
quoi répondait en écho le pauvre Rutebeuf, ce sont amis que vent emporte… À
cette époque, il n'était pas rare qu'un fil de framc comporte une centaine de
commentaires. Et attention ! il y avait du contenu, des idées ! des
contradictions ! des arguments ! On ne se contentait pas de balancer un lien
Youtube ! On retrouvera tout au long de cette interminable contribution
quelques allusions à Melmoth, Toulet, Gero, le psychiatre (†), Tournier (†),
Yves C., Nutella (c'était David le Marrec, ainsi surnommé parce qu'il
tartinait encore plus que moi), Redis-le-Moelleux, (c'était Patachon,
également dit la Patache mortelle, avec qui j'avais eu quelques sanglantes
engueulades), Papidécati, (c'était G. Préyale), Sergent, Trop Polloli pour
être au Net, mon collègue et néanmoins ami, et les filles, La Fred, Papagena.
Ceux qui sont fous devenus, ceux qui sont morts devenus, ceux qui sont vieux
devenus, ceux que le vent a emporté. Ça s'appelait "Les invraisemblables
aventures de Maelzel", et, en relisant, c'était, après tout pas mal troussé.
"La neige colle aux carreaux, les bûches crépitent dans l'âtre,
réjouissez-vous, gens du forum. Paul & Mick Victor va vous narrer les
invraisemblables aventures de Maelzel. Approchez, mes enfants, faites cercle,
allez chercher les absents, installez vous bien à l'aise, les plus petits
devant, s'il te plaît Melmoth, cesse de te gratter les khouilles, mon garçon,
et laisse la place à papidécati, mais oui, il est plus petit que toi, et il
n'entend pas très bien, le pauvre. Tout le monde est installé, ça y est ? La
Fred et Papagena, soyez sympa, les filles, vous aurez tout le temps après
pour raconter vos histoires, hein…
Adoncques, sur le tableau de bord de notre machine à remonter le temps,
réglons le transfusateur inductif à bobines tri-magnétiques sur la date du 15
août 1772. Fermons les yeux un moment, ça secoue un peu, n'aie pas peur,
Nutella, ça ne sera pas long, d'ailleurs nous y voilà, Ratisbonne, tout le
monde descend ! Ratisbonne, vous ne connaissez peut-être pas, c'est une
charmante petite localité de Bavière, sur le Danube, localité que les
Allemands, ces khons, n'appellent pas Ratisbonne, mais Regensburg, pour
d'obscures raisons teutonnes sur lesquelles il serait inutile de s'étendre.
En ce 15 août 1772, le soleil rayonne, il fait très chaud et toutes les
fenêtres sont ouvertes. Braquons notre objectif indiscret vers les fenêtres
du 19 Müllerstrasse. Quelle curieuse agitation aujourd'hui chez les Maelzel !
On fait bouillir de l'eau, le vieux Tobias Nussbaumer, le médecin, entre
précipitamment dans l'immeuble, enfin des cris de nourrisson viennent secouer
la torpeur de ce début d'après-midi estival. Madame Maelzel vient de mettre
au monde un adorable bambin de 3,6 kilos. Comment c'est-y qu'on va l'appeler,
ce p'tiot ? demande l'heureuse maman à son bonhomme de mari. T'as pô une
idée, toi ? Monsieur Maelzel père se gratte la tête, ben non, j'en ai pô… —
J'en ai pô, j'en ai pô, répète le vieux Tobias Nussbaumer, hilare, Jean-Népo…
mucène !! Adjugé vendu, il s'appellera Jean-Népomucène, ce qui avouez-le, est
un nom rigolo, mais bien difficile à porter.
Le petit Jean-Népomucène, qu'on appelle toujours par facétie Jean-Népo,
grandit donc, jours heureux de l'enfance, entre une mère aimante dont le cœur
est un réservoir infini de tendresse, et un papa qui cache sous une apparente
sévérité des trésors d'indulgence. Il est facteur, le papa de Jean-Népo, non
pas le facteur que vous connaissez, celui qui vaillamment, chaque jour, au
mépris de la pluie et du vent, affronte la boue du chemin ou le soleil de
plomb de nos étés qui ne sont plus ce qu'ils étaient, pour vous apporter le
catalogue de la Redoute (qui c'est qu'a dit des 3 Suisses ?) ou la feuille
d'impôt tant espérée, non, il est facteur d'orgue. Qu'est-ce ça veut dire ?
Ca veut dire, Toulet, qu'il fabrique des orgues. C'est un bricoleur, le papa
Maelzel, et un bricoleur de génie. Rouages, ressorts, cames, leviers,
pistons, bielles, poulies, il est aussi à l'aise devant un engrenage
compliqué qu'un gynécologue devant un chancre mou, je t'expliquerai,
Papagena. Lorsqu'une machine tombe en rideau dans Ratisbonne, qui c'est qu'on
va chercher ? Le père Maelzel ! Quand l'horloge municipale dékhonne et sonne
midi à 14 heures, qui c'est qu'on va chercher ? Le père Maelzel ! Quand la
batteuse-lieuse du vieil Hermann ne bat plus rien que la breloque, qui c'est
qu'on va chercher ? Le père Maelzel ! (qui est d'ailleurs très prudent avec
ces engins, vu qu'il s'est déjà fait happer le bras par une batteuse-lieuse
en 1762, et qu'on l'a surnommé depuis par dérision, les gens sont méchants,
l'happé de Ratisbonne…)
Musique et mécanique, tel est donc le credo du père Maelzel, qui offre à son
fils, outre des leçons de piano, un beau meccano, un vrai, avec des pièces en
métal bleues et jaunes bien rangées dans leur boîte, la petite clé pour
serrer les écrous, vous ne connaissez pas, les jeunes, c'était autre chose
que les Playmobil ou les Lego en plastoc qu'on fait maintenant. Qu'est-ce que
tu veux faire, plus tard ? qu'elle demande, la maîtresse au petit Jean-Népo,
qui répond invariablement : je serai musimécanicien… Ca 'xiste pas,
s'esclaffent ses petits khamarades. Et ben, je serai le premier, dit l'entêté
gamin en serrant ses petits poings, et celui qu'est pas d'accord, jui pète la
gueule à la récré… Alors il récolte une punition, et il se trompe, l'innocent
bambin. C'est qu'il ne peut pas savoir que bien des années avant lui, le père
Athanase Kircher, jésuite génial et baroque, méritait déjà ce titre
merveilleux de musimécanicien. Mais ceci est une autre histoire que je vous
conterai un jour, si vous êtes sages…
Adoncques, le jeune Jean-Népo fait des progrès rapides, ben tiens, quand on
travaille sérieusement ses gammes et ses arpèges, hein, Yvecé ? Si bien qu'à
14 ans, il est considéré comme l'un des meilleurs pianistes de Ratisbonne, et
qu'il commence à donner des leçons, dont il rapporte ponctuellement tout
l'argent à sa maman, ne distrayant que quelques piécettes pour s'acheter
Système D, le Haut-Parleur, ou plus rarement les Folies de Paris-Hollywood,
ben quoi, t'as jamais été travaillé par la puberté, toi ? Y'a pas que la
partie mécanique, dans la vie, y'a aussi la partie mec à nique, hein… Elle
est excellente. Mais l'appel des rouages est le plus fort. Il en rêve la
nuit, quand les engrenages dansent leur samba effrenée autour de son lit, il
en rêve le jour, et dans sa tête pistons et bielles pratiquent d'obscènes
copulations sous l'œil lubrique des ressorts à boudin et des écrous. C'en est
trop… En 1802, le 16 septembre, je m'en souviens comme si c'était hier, il
venait d'avoir 30 ans, comprenant que Ratisbonne, c'était bien gentil, mais
que pour un fondu de la mécanique, ça manquait un peu d'avenir, il fait son
baluchon, embrasse sa vieille maman, son papa qui est en train de rafistoler
un coucou de la Forêt Noire, et il s'écrie : À nous deux, Paris !
Car avant d'aller se perfectionner dans son art à Londres, puis à Vienne,
c'est à Paris d'abord que Jean-Népo va chercher la gloire. On ne voit que lui
au rayon bricolage du BHV. Chez Castorama, on l'appelle Monsieur Maelzel gros
comme le bras, vu le pognon qu'il y laisse, ils peuvent bien, hein, et les
jours de Salon du Bricolage ou de Concours Lépine, il est le premier à
franchir le seuil et le dernier à quitter les lieux. C'est à cette période
qu'il s'attelle à la fabrication du Panharmonikon, dont trop Polloli pour
être honnête a rappelé que ça n'avait pas de rapport avec les points
Mekilékon. J'ai déjà parlé longuement de ce mystérieux instrument, mais comme
personne n'écoute, hein ! C'est malheureux, mais on ne sait pas exactement à
quoi ressemblait ce bouzin. D'après les descriptions de l'époque, il
s'agissait d'une machine imposante composée de flûtes automatiques, de
clarinettes, de trompettes, de violons, violoncelles, tambours, cymbales et
triangle. Il pouvait également tirer des coups de mousquets, pistolets, et
canon. Il était paraît-il très puissant, mais capable d'exécuter les nuances
forte et piano avec une grande précision. On peut penser que le Panharmonikon
ressemblait à un Limonaire. Il en existait un exemplaire au
Landesgewerbemuseum (à tes souhaits !) de Stuttgart jusqu'en 1942, date à
laquelle ce musée fut entièrement détruit lors d'un raid de l'Uhessairforce.
C'est pour le Panharmonikon, à la demande de Maelzel, que Beethoven
entreprend de composer la "Bataille de Vittoria" mais les deux hommes se
fâchent et le Grand Sourd, qui a de la suite dans les idées et de la rancune,
continue son œuvre, mais pour un orchestre symphonique cette fois…
Le Panharmonikon est présenté d'abord à Vienne, puis à Paris. Outre
Beethoven, Cherubini compose pour lui une pièce intitulée "Écho", mais bon,
Maelzel a besoin de pognon, il projette la construction d'un nouveau modèle
plus perfectionné, et vers la fin de 1807, il vend la première version de son
instrument pour la somme colossale à l'époque de 60.000 francs. Il construit
une deuxième prototype, qu'il emportera bien plus tard aux États-Unis, et
vendra à un riche américain pour 400.000 dollars. Mais revenons en cette fin
d'année 1807. Après avoir vendu son bouzin, Maelzel s'attache à la
construction d'une nouvelle machine, considérée comme son chef-d'oeuvre : le
trompette automate. De quoi s'agit-il ? demande Nutella dont les yeux
brillent ! Et bien, père la tartine, il s'agit ni plus ni moins que d'un
joueur de trompette mécanique, grand comme ça, avec soufflerie, percolateur
coaxial et réservoir à hélium concentré sous-jacent, taquet de dévérouillage
hélicoïdal, et tout et tout… Tu tournes la petite clé, tu mets les piles, tu
remplis de pétrole, t'allumes la mêche, et ça joue de la trompette, avec une
sonorité fabuleuse, et une virtuosité que même Georges Jouvin avec sa
trompette d'or, il pourrait pas faire mieux. La vie d'un inventeur, parfois,
c'est comme un conte de fée, on a bien raison de le dire. La renommée de Jean
Népo parvient vite aux oreilles de l'empereur d'Autriche, rien que ça, qui le
convoque dans son palais, lui pince l'oreille, il a vu faire ça en France, et
c'est ainsi que l'enfant de Ratisbonne est élevé en 1808 au poste prestigieux
de Mécanicien en chef de la Cour, 1er échelon, avec clé à molette de
fonction, et décoré séance tenante de l'emblème de sa nouvelle dignité, la
pince-crocodile de vermeil sur fond de cambouis. Une nouvelle vie commence.
Qu'est-ce qu'il y a, Redis-le-Moelleux ? tu ne comprends pas tout très bien ?
T'as envie d'aller faire pipi ? Bon, on va faire une petite pause les
enfants, le temps que j'ouvre une bière…
Ah, ça va mieux. Allez, on reprend. Installez-vous… Ben Gero, c'est à cette
heure-ci que tu arrives ? Tu faisais la sieste ? C'est dommage, t'as raté le
début. Tournier et Sergent, poussez un peu, dans le fond, faites une tite
place pour Gero. Allez Redis-le-Moelleux, dépêche-toi, mon grand. Qu'est-ce
qu'il y a ? T'arrives pas à te reboutonner ? Il me tue, ce garçon !
Bon, où en étais-je ? Ah oui. Adoncques, Maezel est à la cour de l'empereur
d'Autriche, et c'est à cette époque, nous sommes en 1808, qu'il commence à
travailler sur le métronome. Alors là, je dis : attention ! Pour bien des
gens, le métronome c'est Maelzel, sans réfléchir davantage, comme le cachou
c'est Lajaunie, le camping c'est Trigano ou les capotes anglaises, c'est
Durex. Là, je répète : attention, et je m'insurge. Prenez en main votre
métronome, le vieux j'entends, pas de ces machins électriques qu'on fait
maintenant, la belle pyramide en bois ciré avec la petite clé qui dépasse sur
le côté. Regardez-le bien ! Il a inventé quoi, Maelzel, là-dedans ? Il a
inventé la réglette graduée ousqu'il y a les chiffres et les indications de
tempo. Et c'est tout ! Tout le reste, c'est pas de lui. Et pourtant,
lorsqu'on dit "métronome", y'a toujours l'érudit de service pour citer
Maelzel, et la huitième symphonie du Grand Sourd, hommage au tic-tac de la
musicale mécanique. À ce propos, je ne suis pas toujours d'accord avec trop
Polloli pour être honnête sur les indications métronomiques chez Beethoven,
mais j'écris en ce moment un mémoire de 756 pages qui sera publié en temps
utile et apportera des révélations fracassantes sur ce sujet…
L'idée d'un petit instrument qui servirait à battre la mesure et à mesurer
les temps n'est pas nouvelle à cette époque. Bien des années auparavant, le
grand Sauveur avait décrit dans les "Principes d'acoustique" un tel appareil,
conçu sur le modèle du pendule, et qu'il avait appelé naïvement le
Chronomètre. Ah, Sauveur ! Avec le père Mersenne, avec Loulié, que ne lui
doit-on pas ? Je vous parlerai un jour de ses travaux sur les sons
harmoniques, je vous raconterai l'histoire de l'échomètre, que voilà un grand
esprit, Sauveur ! Mais revenons à nos moutons. Donc l'idée est dans l'air. Du
chronomètre au métromètre, les têtes pensantes se penchent sur le problème.
En Allemagne, un musicien du nom de Stoeckel a imaginé un appareil de ce
type, jamais réalisé parce que de dimensions colossales, mais dont il a donné
une description détaillée dans la Gazette Musicale de Leipzig, pour ceux qui
ont encore les vieux numéros, c'est à la page 673. On ne sait pas grand chose
de ce Stoeckel, sinon qu'il était cantor à Burg, près de Magdebourg, et qu'il
aimait par-dessus tout la crème caramel, surtout quand elle était un peu
brûlée. Toujours est-il que la Gazette Musicale de Leipzig tombe un jour
entre les mains de Jean-Népo, qui lit l'article de Stoeckel avec une
attention fiévreuse, et entreprend de réaliser le bouzin décrit à la page
673.
Le problème du métromachin de Stoeckel, c'est qu'il est très gros, trop gros,
tu peux pas l'emporter avec toi en répète, il faut louer une camionette… Et
pourquoi qu'il est si gros, le bidule ? Simplement parce que Stoeckel n'a pas
su résoudre ce problème qui nous paraît aujourd'hui si élémentairement
enfantin : comment faire varier la vitesse de battement sur une même
mécanique ? Le métromachin battait bien des vitesses différentes, mais pour
chacune de ces vitesses, il fallait une mécanique distincte, une pour lento,
une pour adagio, une pour andante, et t'essaieras, et t'essaieras… Tu vois
d'ici l'engin. Et Maelzel, pas plus que Stoeckel, ne trouve la soluce au
problème. Il a beau se creuser les méninges, rien, il est sec, Jean-Népo. Là,
il est tombé sur un os. Il y pense encore en 1812, lorsqu'il se rend en
Hollande pour faire un peu de lèche-vitrine. C'est là qu'il a l'idée d'aller
consulter son confrère en mécanique, le grand Winkel. Un petit mot sur
Winkel, mais rapide, pour ne pas lasser l'auditoire. Il se prénommait
Diedrich, ou Thierry-Nicolas, on n'est pas très fixé, et avait commencé sa
carrière en construisant des métiers à tisser, avant de se lancer dans la
facture d'orgues mécaniques, domaine dans lequel il se fit vite remarquer
pour la perfection de ses instruments. Winkel reçoit fort poliment son
concurrent, mais néanmoins ami, écoute attentivement les données du problème,
examine les plans et les feuilles de calcul, et dit que bon, il va y
réfléchir, et les deux compères finissent la soirée en torchant une bouteille
(certains disent deux, d'autres trois) de genièvre dans un bar louche de
Kalverstraate.
Maelzel rentre en Autriche avec une bonne gueule de bois, et oublie le
métromachin. Quelques années plus tard, nous sommes en 1815, il retourne à
Amsterdam pour présenter son Panharmonikon, rappelez-vous, le nouveau modèle,
et voilatipa que quelqu'un lui tape sur l'épaule, c'était, vous l'avez
deviné, Thierry-Nicolas Winkel. Salut, ça va, et la petite famille, et tout
ça, et tu te rappelles le problème que tu m'avais soumis il y a trois ans, et
ben ça y est, je crois que j'ai trouvé ! Non ? Pas possible ? demande
Jean-Népo, qui l'a complètement oublié, et qui ne garde de son séjour dans la
capitale batave que le souvenir d'une cuite monumentale et d'une chaude-lance
qui lui avait fait pisser des lames de rasoir pendant trois mois au moins.
Mais si, qu'il insiste, Winkel, viens à la maison, je te montrerai.
Assieds-toi, prends un verre, un petit genièvre, ça nous rappellera le bon
temps, regarde, c'est enfantin, comme le dira dans quelques siècles P&MV : il
suffit d'une seule mécanique, avec un balancier, un seul, sur lequel on
ferait glisser un poids, de façon à déplacer le centre de gravité et à
imprimer des vitesses différentes au bidule. Ébloui par tant de géniale
simplicité, Maelzel se frappe le crâne violemment, mais bordel de merde, mais
oui, c'est bien sûr, quel khon, mais quel khon, mais que je suis khon, c'est
rien de le dire… Et Winkel de le consoler, mais non, mais non, ça arrive à
tout le monde, tiens, reprend un verre, mon gars, et on ira voir les filles…
Maelzel revient à nouveau en Autriche, avec une gueule de bois qui vaut
largement la précédente, et là, soyons honnêtes, il se comporte comme un
salaud. Je n'aime pas dire du mal des gens, mais là, vraiment, comme un
salaud ! Ce pourri s'approprie la découverte de Winkel, remplace le balancier
par une réglette graduée, la seule partie du métronome qui soit vraiment de
lui, et présente l'objet fini à l'Institut de France, qui donne son
approbation dans la "Notice sur le métronome de Maelzel" (Paris - 1816 - in-8
de 24 pages). Pire encore, poussé par l'appât du gain, il crée à Paris une
société commerciale pour fabriquer et diffuser la géniale mécanique qui lui
doit si peu. Il n'est pas exagéré de dire qu'il se fait des khouilles en or.
Winkel en est très attristé, et quelque peu irrité, faut se mettre à sa
place. Il fait paraître un article cinglant dans la Revue Musicale de
Leipzig, décidément la seule revue qu'on semble lire à l'époque, (c'est dans
le N° 25 pour ceux qui ont gardé les archives) article où il explique que le
monde est méchant, et qu'il n'y a qu'un inventeur du métronome, et que c'est
lui. A l'occasion d'un déplacement de Maelzel en Hollande, Winkel demande
même à corzéacris l'arbitrage de l'Institut des Pays-Bas, qui examine
longuement le dossier, et convoque les deux compères. La vérité oblige à dire
que devant la commission, sommé de s'expliquer, Maelzel baisse lamentablement
son froc, reconnaît piteusement qu'il s'est comporté comme un pignouf et un
dégueulasse, mais que, hein, après tout, la petite réglette graduée, c'est
quand même bien de lui. L'affaire est close.
L'affaire est close, mais la fortune souriant décidément aux salaud, Maelzel
continue d'empocher les bénéfices dégagés par la vente de son métronome, dont
il inonde l'Europe, et sans reverser un pélot à Winkel, pas khon, Jean-Népo.
Nous sommes à présent, petits amis, en 1817, et Maelzel demeure à Vienne.
C'est là qu'une nouvelle imposture va le désigner à l'opinion publique : il
s'agit du célèbre joueur d'échecs.
On a tout dit de ce joueur d'échec. Le grand Edgar Allan Poe lui-même lui a
consacré une nouvelle, dont vous lirez la traduction admirable de Baudelaire.
De quoi s'agissait-il ? D'une machine, d'un automate capable de jouer aux
échecs, et de gagner. À l'heure où Vladimir Kramnik vient d'arracher le nul
contre Deep Frizt et d'empocher 700.000 dollars, le sujet est d'actualité.
Maurice Beaucaire, le sympathique président de l'Union Échiquéenne de France,
nous a donné une description de cette étonnante mécanique : "L'automate était
assis en face d'un échiquier garni de toutes ses pièces. Il pouvait lever le
bras, saisir une pièce, et la plaçait sur la case où elle devait être
placée". Là encore, c'est bien à tort que le Joueur d'échecs est attribué à
Maelzel, qui s'est contenté de le racheter aux héritiers de son véritable
inventeur après le décès de celui-ci, j'ai nommé le baron Wolfgang von
Kempelen. Un mot sur ce baron, vous insistez vraiment ? Souate ! Il était né
à Presbourg en 1720, et accumulait les charges et les titres prestigieux,
puisqu'il était, entre autres, Conseiller de la cour royale et impériale,
Référendaire à la chancellerie de la cour royale de Hongrie et Président de
l'amicale bouliste des joyeux cochonnets de la Haute-Vienne… C'était
également un bidouilleur de génie, à qui l'on doit la conception d'une
machine parlante très ingénieuse, décrite dans "Mechanismus der menschlichen
Sprache, nabst der Beschreibung einer sprechenden Maschine", publiée à Vienne
en 1701, avec 27 planches.
Le Joueur d'échecs avait été inventé dès 1770, mais c'est seulement au début
du XIXe siècle que Maelzel, le nouveau propriétaire, avec le sens pratique et
commercial que nous lui connaissons, lui apporte la consécration. Allons, je
peux bien vous le dire maintenant, c'est comme au music-hall, dans le numéro
du magicien, quand on met la bonne femme dans la boîte et qu'on scie le
cercueil, y'a un truc, une astuce à la Robert Houdin. En fait, un vrai joueur
d'échecs est caché dans le coffrage de la machine, sous la table qui supporte
l'échiquier, et lorsqu'on ouvre ce coffrage pour montrer que non, y'a rien,
un astucieux système de miroirs dissimule le bonhomme. Ce joueur d'échecs en
chair et en os s'appelle M. Boncourt. Il a une qualité, il joue très bien aux
échecs, il a un défaut, il est très grand, il est trop grand, si bien qu'il
est obligé de se plier en quatre pour rentrer dans la machine, et qu'il lui
faut une bonne heure après la représentation pour se déplier et retrouver
l'aisance de ses mouvements, sans compter le mal de dos.
Comme pour le métronome, Maelzel s'approprie sans vergogne la paternité du
Joueur d'échecs, ben dame, quand on a posé un pied sur la pente ô combien
savonneuse du crime, hein… Pire encore, il fauche une autre invention de
Kempelen, la machine parlante dont je vous ai déjà parlé, et l'adapte dans le
joueur d'échecs pour lui faire dire d'une petite voix khonne : "Échec et
mat"… Et dans la foulée, il dépose un brevet pour une poupée parlante
fonctionnant sur le même système de Kempelen et qui dit : bonjour papa,
bonsoir maman, la poupée, pas Kempelen. Faut le faire, hein !
On pourrait écrire un livre sur les périgrinations du Joueur d'échecs. Je ne
manquerai pas de le faire dès que je serai à la retraite. Il est présenté
dans l'Europe entière, et rapporte des fortune à Jean-Népo (fortunes qu'il
gaspille d'ailleurs dans les bouges mal famés, l'alcool, le strupre et la
fornication, car il est aussi débauché que malhonnête). L'automate dispute
même une partie contre l'empereur Frédéric à la cour de Berlin, partie que
ledit Frédéric perd d'ailleurs, ce qui incite le monarque à acquérir la
machine. Elle reste quelques années dans un placard, à prendre la poussière,
jusqu'au jour où Napoléon passant par là, ouvre le placard, récupère l'objet,
lui fait donner un petit coup de peinture et le ressuscite pour quelque
temps. Le prince Eugène, un grand gamin, ne résiste pas. Dès qu'il voit le
bidule, il tape du pied, trépigne, j'le veux, qu'il gueule, j'le veux ! et il
l'achete séance tenante 30.000 francs à Napoléon, qui s'est bien gardé de lui
expliquer qu'il y avait un truc et qui se marre comme une baleine, quel khon,
ce prince Eugène, qu'il dit à Joséphine, le soir dans la couche impériale.
Le fait est que le prince Eugène s'est fait rouler, et dès qu'il s'en
aperçoit, il cherche à se débarrasser de la machine. Comme par hasard Maelzel
passe par là, mais hein, c'est de bonne guerre, c'est plus le même tarif, et
il récupère sa mécanique pour une bouchée de pain, heureux de n'avoir pas
réalisé une trop mauvais opération financière. Comme M. Boncourt ne veut plus
rentrer dans la boîte, faut se mettre à sa place, à cet homme, il est
remplacé par M. Alexandre, puis par M. Mouret, et Maelzel reprend ses
tournées en Europe, gagnant du pognon à ne savoir qu'en faire, et le
dépensant tout aussi vite avec des femmes de mauvaise vie, des créatures qu'à
côté desquelles les filles qui fréquentent ce forum, malgré toutes leurs
turpitudes, seraient considérées comme des oies blanches. Pire encore, il
paye ses joueurs d'échecs au lance-pierre, le Jean-Népo, si bien que les
malheureux, déjà que passer des heures dans une boîte, c'est pas drôle,
touchent pour ça des clopinettes et se vengent bassement du patron en
dévoilant le truc à qui veut l'entendre. Très vite, ce mauvais procédé porte
ses fruits, et Maelzel est grillé. Le joueur d'échecs ? Y'a un truc, hé
patate ! Sans compter que ce panier percé accumule les dettes, et se voit
quotidiennement harcelé par une bande de créanciers féroces. Comme bien
d'autres, il se résout donc à l'exil, et, remplissant ses malles d'automates,
de son Panharmonikon, de son métronome, de son joueur d'échecs, de son
danseur de corde, et de bien d'autres trucs encore, il passe en Amérique. Les
douanes et les contrôles de police devaient être moins sévères à l'époque.
Aujourd'hui, avec un bric-à-brac pareil, il ne pourrait jamais monter dans un
avion, Jean-Népo. Je te dis pas le portique de sécurité, comment qu'il se
mettrait à couiner, hein…
Nous sommes à présent en 1827, le Grand Sourd s'éteint, et Maelzel conquiert
l'Amérique avec ses inventions. De New York à Philadelphie, puis de
Philadelphie à Boston où il s'installe, son succès est considérable, ces
yankees sont de grands enfants, ils se pressent pour voir le Joueur d'échecs,
le Panharmonikon, le danseur de corde, le tompette automate. Il gagne des
millions de dollar, Jean-Népo, et il continue à produire des trucs pas
possibles, tel cet automate à larynx mécanique capable de monter et de
descendre des gammes diatoniques et chromatiques. Il perfectionne même le
métronome, encore une fois à partir de l'idée d'un autre. C'est en effet à
Amiens que l'horloger Bienaimé-Fournier a eu l'idée de fabriquer un métronome
qui accentuait certains battements, tous les deux, trois, ou quatre coups, de
façon à indiquer également les mesures. Maelzel adapte cette trouvaille,
intégre une petite sonnette qui marque ces coups accentués, et vend le brevet
à M. Wagner, horloger à Paris. C'est ce M. Wagner qui construira, pendant des
décennies, ces beaux métronomes qui sentaient bon la cire et qui surmontaient
si joliment les pianos des salons de nos grands-mères.
Tout à une fin, petits amis. Un jour qu'il faisait un voyage vers
Philadelphie, Maelzel mourut, qui l'eût cru, pleurez mes yeux, c'était au
mois d'août 1838, il avait tout juste 66 ans. Le médecin appelé essaya
vainement de tourner la clé, de remonter le ressort, rien n'y fit. La
mécanique était cassée à jamais.
Et voilà qu'il est temps de nous séparer, petits amis. J'espère que mon
histoire vous a plu, et je vous souhaite une bonne nuit. Vous remettrez les
chaises en place en sortant, tiens, Redis-le-Moelleux s'est endormi, c'est
toujours comme ça quand il ne comprend pas très bien, Melmoth, cesse de te
gratter les khouilles, c'est agaçant à la fin, mon garçon…"
Préyale (Papidécati) est mort depuis bien longtemps : tu peux ajouter
une croix, à lui aussi.
Marie Noël sans trait d'union. C'est son nom de plume pas son prénom.
J'aurais écrit " Ceux que le vent a emportés", avec l'accord donc.
Lu que le seul premier §.
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Paul & Mick Victor
2023-10-02 17:15:26 UTC
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Post by Marcel grouillard
Préyale (Papidécati) est mort depuis bien longtemps : tu peux ajouter
une croix, à lui aussi.
Marie Noël sans trait d'union. C'est son nom de plume pas son prénom.
J'aurais écrit " Ceux que le vent a emportés", avec l'accord donc.
Lu que le seul premier §.
Le premier commentaire est une triste information, mais sans grande
surprise. Un papi décati en 2002 risquait fort d'être un papi très
décati en 2023... Une moment de silence à la mémoire de ce sympathique
géronte.

Le deuxième commentaire est tout à fait pertinent. Je bats ma coulpe et
présente toutes mes excuses aux mânes de cette poétesse. Écorcher un
nom constitue une faute, d'autant plus inexcusable que ce nom est connu
et facilement vérifiable sur Internet.

La troisième remarque est inutile, et désobligeante. Bien sûr, il y a
une faute d'accord. Tout le monde l'a relevée. On en trouvera d'autres,
sans aucun doute, car bien que je relise attentivement mes
contributions avant de les poster, c'est une malédiction, je trouve
toujours une ou deux horreurs oubliées qui m'écorchent les yeux lorsque
je lis le résultat publié. Je rappelle ce conseil de nétiquette en
usage sur Usenet : "Le bon usage des forums Usenet considère comme
inconvenantes les remarques relatives aux fautes d'orthographe
éventuellement commises par les contributeurs."

Lorsqu'il m'arrive de souligner une faute d'orthographe commise par un
autre, c'est moins pour discréditer le posteur que pour amuser la
galerie. Ainsi, à quelqu'un qui se plaindra que la musique
contemporaine comporte trop de "dissonnances", je demanderai finement :
"Pourquoi tant de haine ?" Et à celui qui me reprochera mon caractère
"irrascible", je répondrai - tout aussi finement - : "Toi, tu ne
manques pas d'air." Mais je ne reprendrais pas celui qui écrirait "Des
mouton étaient en sûreté dans un parc" en lui disant : "Voyons, mon
garçon, il n'y a pas qu'un moutonne, il y a plusieurs moutonsse." Parce
que ça n'apporte rien et que je ne suis pas Topaze.

Quant à la dernière remarque, elle relève purement et simplement de la
gougnafrerie la plus éhontée. Ou bien tu lis la contribution entière,
et, éventuellement, tu la commentes, tu la critiques, tu la réfutes, tu
la démolis, tu la conchies et tu la traînes dans la boue, pourquoi pas,
c'est ton droit le plus strict, et c'est à ça que sert un forum. Ou
bien tu ne la lis pas, ce qui est aussi ton droit le plus strict, et
dans ce cas, tu n'as rien à en dire. Mais ce "Lu que le seul premier §"
- épinglé comme un post-it rageur de haut fonctionnaire complètement
débordé qui n'a même pas le temps de faire une phrase complète et
d'écrire "paragraphe" en toutes lettres, témoigne d'un mépris et d'une
désinvolture de, justement, haut fonctionnaire débordé, agacé que le
petit personnel ose lui présenter un volumineux dossier qui a demandé
des heures de travail, alors qu'il a tant de choses beaucoup plus
importantes à faire, un cocktail à la Préfecture, par exemple, ou un
repas avec le ministre.
Un conseil : ne lis pas la suite. Il y a effectivement dans la vie des
des choses beaucoup plus importantes.
--
Paul & Mick Victor
petit personnel
Marcel grouillard
2023-10-03 04:56:36 UTC
Permalink
Post by Marcel grouillard
Préyale (Papidécati) est mort depuis bien longtemps : tu peux ajouter
une croix, à lui aussi.
Marie Noël sans trait d'union. C'est son nom de plume pas son prénom.
J'aurais écrit " Ceux que le vent a emportés", avec l'accord donc.
Lu que le seul premier §.
Le premier commentaire est une triste information, mais sans grande surprise.
Un papi décati en 2002 risquait fort d'être un papi très décati en 2023...
Une moment de silence à la mémoire de ce sympathique géronte.
Le deuxième commentaire est tout à fait pertinent. Je bats ma coulpe et
présente toutes mes excuses aux mânes de cette poétesse. Écorcher un nom
constitue une faute, d'autant plus inexcusable que ce nom est connu et
facilement vérifiable sur Internet.
La troisième remarque est inutile, et désobligeante. Bien sûr, il y a une
faute d'accord. Tout le monde l'a relevée. On en trouvera d'autres, sans
aucun doute, car bien que je relise attentivement mes contributions avant de
les poster, c'est une malédiction, je trouve toujours une ou deux horreurs
oubliées qui m'écorchent les yeux lorsque je lis le résultat publié. Je
rappelle ce conseil de nétiquette en usage sur Usenet : "Le bon usage des
forums Usenet considère comme inconvenantes les remarques relatives aux
fautes d'orthographe éventuellement commises par les contributeurs."
Lorsqu'il m'arrive de souligner une faute d'orthographe commise par un autre,
c'est moins pour discréditer le posteur que pour amuser la galerie. Ainsi, à
quelqu'un qui se plaindra que la musique contemporaine comporte trop de
"dissonnances", je demanderai finement : "Pourquoi tant de haine ?" Et à
celui qui me reprochera mon caractère "irrascible", je répondrai - tout aussi
finement - : "Toi, tu ne manques pas d'air." Mais je ne reprendrais pas celui
"Voyons, mon garçon, il n'y a pas qu'un moutonne, il y a plusieurs
moutonsse." Parce que ça n'apporte rien et que je ne suis pas Topaze.
Quant à la dernière remarque, elle relève purement et simplement de la
gougnafrerie la plus éhontée. Ou bien tu lis la contribution entière, et,
éventuellement, tu la commentes, tu la critiques, tu la réfutes, tu la
démolis, tu la conchies et tu la traînes dans la boue, pourquoi pas, c'est
ton droit le plus strict, et c'est à ça que sert un forum. Ou bien tu ne la
lis pas, ce qui est aussi ton droit le plus strict, et dans ce cas, tu n'as
rien à en dire. Mais ce "Lu que le seul premier §" - épinglé comme un post-it
rageur de haut fonctionnaire complètement débordé qui n'a même pas le temps
de faire une phrase complète et d'écrire "paragraphe" en toutes lettres,
témoigne d'un mépris et d'une désinvolture de, justement, haut fonctionnaire
débordé, agacé que le petit personnel ose lui présenter un volumineux dossier
qui a demandé des heures de travail, alors qu'il a tant de choses beaucoup
plus importantes à faire, un cocktail à la Préfecture, par exemple, ou un
repas avec le ministre.
Un conseil : ne lis pas la suite. Il y a effectivement dans la vie des des
choses beaucoup plus importantes.
Comme je vous comprends ! Quand on a de si hautes ambitions
littéraires, on supporte mal d'être pris en flagrant délit de lacunes
langagières primaires. Mais il y a pire encore : ne pas être lu (ce qui
signifie, plus exactement, ne pas donner envie d'être lu).... Oui,
j'aime le style sec, musclé, nerveux. Pas les bavardages (les vôtres
sont parfois assez drôles pourtant, c'est vrai).

ps: on écrit gougnaferie et non pas "gougnafrerie". Ah oui! la
"netiquette" : quel beau paravent !
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Julien Duconlajoie
2023-10-03 11:57:52 UTC
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Post by Marcel grouillard
Comme je vous comprends ! Quand on a de si hautes ambitions
littéraires, on supporte mal d'être pris en flagrant délit de lacunes
langagières primaires.
Hautes ambitions littéraires qui se sont vendues à 4 exemplaires
dont un , acheté par son cousin. Cela expliquant le personnage ..
Parait -il que même son ami *Fabrice* , ne l'a pas acheté !


Mais il y a pire encore : ne pas être lu (ce qui
Post by Marcel grouillard
signifie, plus exactement, ne pas donner envie d'être lu).... Oui,
j'aime le style sec, musclé, nerveux. Pas les bavardages
Tu ne feras jamais parti de son premier cercle , *Marcel *! tant pis !
Post by Marcel grouillard
ps: on écrit gougnaferie et non pas "gougnafrerie". Ah oui! la
"netiquette" : quel beau paravent !
de Gougnafier ..et non pas Gougnafrier
Post by Marcel grouillard
--
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www.avast.com
Julien Duconlajoie
2023-10-08 10:55:15 UTC
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Post by Paul & Mick Victor
Lorsqu'il m'arrive de souligner une faute d'orthographe commise par un
autre, c'est moins pour discréditer le posteur que pour amuser la
galerie. '
...Mais quelle hypocrisie ..! à ce niveau , c'est de l'abstraction pure !
Paul-Olivier Margail
2023-10-04 20:47:46 UTC
Permalink
Post by Paul & Mick Victor
À propos du métronome, j'ai retrouvé une contribution que j'avais
postée sur ce forum en 2002, et que je redonne ici, parce qu'elle était
admirable. (...°
Tiens, puisque nous sommes dans les resucées, j'aimerais relire ton
article sur le chromatisme, les demi-thons et ceux qui mastiquent.
--
P-Ol, oh putain, quand l'autre va voir ça, il va taper une crise
d'hémorroïdes
MELMOTH
2023-10-04 22:09:12 UTC
Permalink
Post by Paul-Olivier Margail
les demi-thons et ceux qui mastiquent
Ohhhh !...
liaM
2024-03-02 20:28:04 UTC
Permalink
Post by Paul-Olivier Margail
Post by Paul & Mick Victor
À propos du métronome, j'ai retrouvé une contribution que j'avais
postée sur ce forum en 2002, et que je redonne ici, parce qu'elle était
admirable. (...°
Tiens, puisque nous sommes dans les resucées, j'aimerais relire ton
article sur le chromatisme, les demi-thons et ceux qui mastiquent.
Je viens d'ausculter un autre texte du même auteur, qui relève en
détail les originalités de ChatGPT. Que voila ChapeauPMV !

j***@free.fr
2023-10-05 07:02:54 UTC
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Post by Paul & Mick Victor
À propos du métronome,
[...]

Je me souviens de cette contribution qui m'avait beaucoup impressionné
à l'époque.

J'ai un tel métronome mécanique de marque Willner made in W. Germany
mais bizarrement il n'est pas régulier. Je suis curieux de savoir si
c'est un problème courant. J'ai dû me résoudre à acheter un métronome
électronique estampillé d'une marque de montres japonaises.
Post by Paul & Mick Victor
Nous sommes à présent, petits amis, en 1817, et Maelzel demeure à
Vienne. C'est là qu'une nouvelle imposture va le désigner à
l'opinion publique : il s'agit du célèbre joueur d'échecs.
[...]

L'automate joueur d'échec racheté aux Puces par Gaston (album R2
p. 19) a une manière bien particulière d'être invincible...

Plus sérieusement, l'automate cachant un joueur d'échecs ou plus
récemment les programmes d'échecs comme Deep Blue ou Stockfish avaient
été initiés à ce jeu pour atteindre un haut niveau. C'est plus
impressionnant d'apprendre qu'AlphaZero a dépassé ce niveau en
apprenant tout seul.

Je me demande si une machine pourrait apprendre la musique par elle
même sans connaissance préalable et quel sens cela aurait.
Paul & Mick Victor
2023-10-07 22:50:16 UTC
Permalink
Post by j***@free.fr
Je me demande si une machine pourrait apprendre la musique par elle
même sans connaissance préalable et quel sens cela aurait.
Sans connaissance préalable, cela paraît difficile, car il faudrait au
moins lui indiquer ce qu'on attend d'elle, c'est-à-dire composer de la
musique. Et quelle voie suivrait-elle ? La voie de la musique savante
occidentale, avec ses gammes tempérées, ses édifices harmoniques, ou
des voies extra-européennes, des musiques monodiques ou stratifiées ?
Pourquoi, seule, choisirait-elle de composer des fugues ou des sonates
plutôt que des ragas hindous ou des guyues chinois ? Ce qui revient à
poser la question : Quels matériaux mettrait-on à sa disposition ?
Quels instruments lui donnerait-on ? Il est probable que la machine ne
composerait pas la même musique selon qu'on lui donne un piano, un
orchestre symphonique, un yukulele, une balalaïka, un tampura indien ou
un gamelan balinais. Si Mozart n'avait eu qu'un gamelan balinais à sa
disposition, il n'aurait pas composé les Noces de Figaro. Il n'aurait
sans doute pas eu moins de génie, mais il aurait composé autre chose.

Mais si on apprend à la machine les bases, les rudiments de la musique
savante occidentale, le solfège, l'harmonie, les formes musicales, les
styles, elle est aujourd'hui capable d'exploits tout à fait
remarquables. Je ne sais pas si quelqu'un ici a déjà parlé de David
Cope, professeur de musicologie à l’Université de Californie, à Santa
Cruz. Il a mis des années à concevoir un programme informatique destiné
à la composition musicale, EMI (Experiments in Musical Intelligence).
Je reproduis ici un extrait du livre de "Homo Deus", le livre de Yuval
Noah Harari : "Il lui fallut [à David Cope] sept ans pour créer le
programme, mais une fois que ce fut fait EMI composa cinq mille chorals
à la Bach en une seule journée. À l’initiative de Cope, quelques-uns
furent joués au festival de musique de Santa Cruz. Des auditeurs
enthousiastes se dirent émus et expliquèrent tout excités que la
musique les avait touchés au plus profond de leur être. Ils ne savaient
pas que c’était une création d’EMI, et non de Bach ; quand la vérité
leur fut révélée, d’aucuns réagirent par un silence morose, d’autres se
mirent en colère."

(…)

"Le professeur Steve Larson, de l’Université d’Oregon, mit Cope au défi
d’accepter une confrontation musicale. Larson suggéra que des pianistes
professionnels jouent trois pièces, l’une après l’autre : chacun une de
Bach, une d’EMI et une de Larson. Le public serait ensuite invité à
voter pour dire qui avait composé quelle pièce. Larson était persuadé
que les gens distingueraient aisément les compositions humaines
émouvantes de l’artefact sans vie d’une machine. Cope accepta. Le jour
dit, des centaines d’enseignants, d’étudiants et d’amateurs de musique
se réunirent dans la salle de concert de l’Université d’Oregon. Un vote
eut lieu à la fin du concert. Résultat ? L’auditoire crut que le
morceau d’EMI était du Bach authentique, que la pièce de Bach était de
Larson, et que celle de Larson était l’œuvre d’un ordinateur."

David Cope n'en resta pas là. Après Bach, il créa Annie, un programme
qui intégrait Beethoven, Chopin, Rachmaninov, Stravinsky. Désormais,
Annie, nourrie de millions de données, continue seule son parcours,
apprend, corrige, perfectionne.

Si l'on veut avoir une idée de ce qu'est capable de produire le
programme de David Cope, il faut écouter son disque : "Classical Music
Composed by Computer". Il est accessible sur Youtube. Assez bluffant,
tout de même :
https://tinyurl.com/4wx3ax55

Et ce n'est pas fini. Cope avoue qu'il ne sait pas ce qu'Annie va faire
dans l'avenir. Il semble que la machine lui ait échappé, qu'elle vive à
présent sa vie. Elle s'est mise à la composition d'hai-ku, des poèmes
japonais.
--
Paul & Mick Victor
Je m'appelle Karl. Je vais vous chanter une chanson que m'a apprise mon
instructeur : Au clair… de la lu…
MELMOTH
2023-10-07 23:16:51 UTC
Permalink
Et ce n'est pas fini. Cope avoue qu'il ne sait pas ce qu'Annie va faire dans
l'avenir. Il semble que la machine lui ait échappé, qu'elle vive à présent sa
vie. Elle s'est mise à la composition d'hai-ku, des poèmes japonais.


À écouter jusqu'au Bout, évidemment...
MELMOTH
2023-10-09 22:08:40 UTC
Permalink
Post by MELMOTH
http://youtu.be/D3hR6nMZHG8
À écouter jusqu'au Bout, évidemment...


Réjouissant !...Le Chirurgien fou en prend plein la Gueule...Ça fait du
Bien...Énormément...
Paul & Mick Victor
2023-10-10 00:30:06 UTC
Permalink
Post by MELMOTH
Post by MELMOTH
http://youtu.be/D3hR6nMZHG8
À écouter jusqu'au Bout, évidemment...
http://youtu.be/yuDBSbng_8o
Réjouissant !...Le Chirurgien fou en prend plein la Gueule...Ça fait du
Bien...Énormément...
J'ai écouté entièrement l'interview de Laurent Alexandre, plutôt
brillant, puis j'ai lu les commentaires qui suivaient. Ils sont, pour
la plupart, très négatifs. J'en retiens un, qui pose une vraie
question, sans doute même la seule vraie question : "J'aime pas les
idées de Laurent Alexandre, mais il faut apprendre à connaitre son
adversaire pour mieux le combattre !". C'est que Laurent Alexandre
s'attaque à des tabous. Par exemple, en avançant l'idée que
l'intelligence, la réussite scolaire, sociale et professionnelle, ne
doivent que très peu aux facteurs socio-culturels et énormément aux
facteurs génétiques, il touche un vrai tabou, un dogme, et le remettre
en question paraît insupportable dans un monde formaté au culte de
l'égalité. Il y a quelques années, façonné moi aussi par l'idéologie
officielle Bourdieusienne, j'aurais sans doute réagi, spontanément,
avec tout autant d'indignation. La réflexion vient-elle avec l'âge ? Je
me demande aujourd'hui si les thèses avancées par Alexandre sont des
"idées" ou des "faits". Si ce sont des idées, on peut effectivement les
combattre, et même on le doit, vu les conséquences cataclysmiques
qu'elles peuvent induire. Si ce sont des faits, l'honnêteté
intellectuelle commande de les étudier, de les vérifier, puis, s'ils
sont avérés, de les admettre et de "faire avec". C'est même la
condition indispensable si l'on veut essayer de leur trouver des
solutions, ou au moins des remèdes.

Puis, j'ai écouté l'autre conférence, de Luc Julia. Ô combien plus
rassurante (mais que ce type est soporifique et mauvais orateur).
L'intelligence artificielle n'existerait pas, et Laurent Alexandre ne
dit que des khonneries. Voilà une thèse bien confortable, l'homme n'est
pas menacé dans ses prérogatives, il est toujours, il sera toujours au
centre de l'univers.

La suite, dans vingt ans, dans trente ans, dans un siècle, je ne la
verrai pas. Et aujourd'hui, mes faibles lumières en ces domaines ne me
permettent pas de trancher, ni même d'avoir un avis (j'entends un avis
étayé, objectif, pas une simple conviction morale ou philosophique).
Mais il me semble que les jeunes générations auraient tout intérêt à se
départir de leur carapace idéologique, quelle qu'elle soit, et à
prendre très au sérieux les propos de Laurent Alexandre, à les étudier
honnêtement, sans a priori, sans tabou, à les vérifier - ou à les
réfuter, sur des bases objectives -, plutôt que de se reposer dans un
confortable et optimiste déni. On a toujours tendance à accueillir
favorablement les opinions qui vont dans notre sens, et à rejeter
celles qui nous blessent ou heurtent nos convictions. C'est bien
normal, tant que ce ne sont que des opinions, c'est même plutôt sain,
et cela fait avancer la réflexion. Mais refuser d'admettre des faits,
refuser de nommer les choses, de mettre des mots sur des réalités, est
aussi irresponsable que d'enfoncer la tête dans le sable pour ne pas
voir le danger. Parce que les faits finissent toujours par s'imposer,
et ils ont toujours raison contre toutes les idéologies. Il faut
toujours envisager le pire, pour s'en prémunir, au risque qu'il ne vous
submerge.

On excusera cette contribution hors sujet, mais après tout, c'est
encore - comme d'habitude - la faute à Melmoth. Je ne peux que
conseiller la lecture des deux brillants pavés de Yuval Noah Harari :
"Homo Sapiens" et "Homo Deus", de "Notre avenir de A à Z" d'Antoine
Buéno, et de ce grand humaniste que fut Stephen Jay Gould : "La
Mal-mesure de l'homme", de Pascal Picq : "L'intelligence artificielle
et les chimpanzés du futur", et des dizaines et des dizaines d'autres
livres, qui ne me viennent pas à l'esprit, ou que je n'ai pas (encore)
lus.
--
Paul & Mick Victor
Chimpanzé du présent
Marcel grouillard
2023-10-11 04:28:18 UTC
Permalink
Post by MELMOTH
Post by MELMOTH
http://youtu.be/D3hR6nMZHG8
À écouter jusqu'au Bout, évidemment...
http://youtu.be/yuDBSbng_8o
Réjouissant !...Le Chirurgien fou en prend plein la Gueule...Ça fait du
Bien...Énormément...
J'ai écouté entièrement l'interview de Laurent Alexandre, plutôt brillant,
puis j'ai lu les commentaires qui suivaient. Ils sont, pour la plupart, très
négatifs. J'en retiens un, qui pose une vraie question, sans doute même la
seule vraie question : "J'aime pas les idées de Laurent Alexandre, mais il
faut apprendre à connaitre son adversaire pour mieux le combattre !". C'est
que Laurent Alexandre s'attaque à des tabous. Par exemple, en avançant l'idée
que l'intelligence, la réussite scolaire, sociale et professionnelle, ne
doivent que très peu aux facteurs socio-culturels et énormément aux facteurs
génétiques, il touche un vrai tabou, un dogme, et le remettre en question
paraît insupportable dans un monde formaté au culte de l'égalité. Il y a
quelques années, façonné moi aussi par l'idéologie officielle Bourdieusienne,
j'aurais sans doute réagi, spontanément, avec tout autant d'indignation. La
réflexion vient-elle avec l'âge ? Je me demande aujourd'hui si les thèses
avancées par Alexandre sont des "idées" ou des "faits". Si ce sont des idées,
on peut effectivement les combattre, et même on le doit, vu les conséquences
cataclysmiques qu'elles peuvent induire. Si ce sont des faits, l'honnêteté
intellectuelle commande de les étudier, de les vérifier, puis, s'ils sont
avérés, de les admettre et de "faire avec". C'est même la condition
indispensable si l'on veut essayer de leur trouver des solutions, ou au moins
des remèdes.
Là, je vous rejoins totalement dans cette défense de Laurent
Alexandre.
Le personnage est honni parce qu'il heurte de front un grand nombre de
tabous, non seulement celui des déterminations socio-culturelles mais s
urtout le mythe de l'immuabilité de la nature humaine (->
"transhumanisme").L'idée que le corps humain deviendra radicalement
autre que ce qu'il a été jusqu'à présent ne peut être supportée par
notre époque. Laurent Alexandre est l'héritier des Lumières,
elles-mêmes désormais de plus en plus incomprises et parfois détestées.
L'esprit scientifique, la valeur du jugement autonome, du fait
supérieur à la simple opinion, de la prééminence de l'homme sur la
nature, tout cela est malheureusement balayé par notre siècle avide
d'opinions conformes. Saluons donc Laurent Alexandre, un des rares
esprits libres d'aujourd'hui.
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MELMOTH
2023-10-11 08:56:05 UTC
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C'est même la condition indispensable si l'on veut essayer de leur trouver
des solutions, ou au moins des remèdes.
N'empêche...Il Me semble très _difficile_ de *réfuter* l'Argumentation
de *Luc JULIA*...

https://www.wikiwand.com/fr/Luc_Julia

De toutes Façons, *PERSONNE ABSOLUMENT PERSONNE* ne sait actuellement
ce qui va se passer à _moyen_, et à fortiori, _LONG
TERME_...PERSONNE...
Marcel grouillard
2023-10-11 09:57:37 UTC
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De toutes Façons, *PERSONNE ABSOLUMENT PERSONNE* ne sait actuellement ce qui
va se passer à _moyen_, et à fortiori, _LONG TERME_...PERSONNE...
Quel truisme !!!! et avec une faute d'orthographe de surcroît !
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MELMOTH
2023-10-07 23:23:37 UTC
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"Il lui fallut [à David Cope] sept ans pour créer le programme
Il faudrait probablement à peine une Journée à GPT4 pour faire la même
Chose !...
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